mardi, décembre 16, 2008

Gens du Médoc : « Les grandes traversées » de Bordeaux, l’interview d’Eric Bernard











La programmation internationale ultra jeune et ultra gonflée de la 8ème édition des « Grandes traversées » à Bordeaux, les 30 et 31 décembre, donne carte blanche autour de la personnalité affirmée de l’artiste danseur chorégraphe et homme de théâtre : Jared Gradinger qui s’ébat entre New York et Berlin. « C’est pourquoi, (nous propose Jared), j’aimerais inviter tous les habitants de Bordeaux et même d’ailleurs à participer à cet incroyable évènement réunissant de jeunes artistes du monde entier qui souhaitent partager, communiquer et poser la question : « How do you are » selon le titre clé de ce remue méninges des corps en mouvement, plein cap sur les nébuleuses de la danse / théâtre / arts plastiques / musique, unique en France, en Europe et dans le monde. Pour en approcher les rivages j’ai interrogé Eric Bernard, l’homme phare et l’esprit créateur de synthèse des « Grandes traversées ».














La Singette : Alors comme ça, c’est toi en personne le grand manitou des « Grandes traversées » ! Qu’est-ce encore que cette chose zarbique style crotte de bique qui me rappelle par trop un certain concept du Bartos qu’il me rabat la joie aux oreilles à langueur de journée, ce con ! Il se revendique de la notion de « Pont » entre tous les arts à l’instar du mouvement expressionniste «die Brücke » (Dresde 1905 / Berlin 1913), nom inspiré de cette citation de Nietzsche : « La grandeur de l’homme vient de ce qu’il est un pont et une fin en soi ». J’espère que toi à ton tour tu ne vas pas reprendre le flambeau de cet éclatement et la fusion entre tous les arts, sinon on ne va pas être copain toi et moi. Autrement dit c’est quoi, c’est qui « Les grandes traversées » et selon quel concept ça tourne et ça progresse ?












Eric Bernard : Les grandes Traversées c’est comme une grande boîte à outils…
C’est donc tout un tas d’outils que chacun peut utiliser pour créer son univers propre et singulier…En plus clair (du moins je l’espère…) c’est un moment de l’année confié à un Artiste d’aujourd’hui, plutôt émergeant et de disciplines artistiques très variables qui vont de la danse aux arts plastiques en passant par la vidéo le cinéma etc.… De toute façon tout cela c’est la même chose si on ne les considère pas comme des finalités mais des moyens. L’ouvre globale réalisé par l’Artiste invité parle du monde qui l’entoure et de tout ce qui fait sens pour lui. En gros c’est une immersion totale dans la création d’aujourd’hui, sous toutes ses formes et aux 4 coins de la planète









La Singette : La danse moderne et ou la danse contemporaine, c’est quoi au juste l’astuce ? A quoi ça peut bien servir d’aller voir des gens se mouvoir sur une scène alors qu’il existe un petit écran de plus en grand et qui prend de plus en plus de place au foyer, avec ses chorés chiadées made in star acte ou autres bastringues calibrés qui sont à la figuration le bon plan des Claudettes derrière les chaussettes de l’archiduchesse ? Tu peux m’expliquer l’utilité de la chose et comment tu te situes dans ce petit monde de la scène vivante des corps en mouvement ?









Eric Bernard : Voir des danseurs sur un écran de TV c’est comme photocopier un livre, ou avoir une reproduction de la Joconde dans son appartement…Cela y ressemble mais ce n’est pas du tout la même chose. Ou alors c’est pareil, mais sans l’émotion… Sans émotion pas de vie et sans vie…De plus les formes artistiques que nous accueillons sont très rarement montrées à la TV et quand elles le sont, c’est généralement dans des chaînes thématiques qui ne sont pas grand public. C’est un paradoxe mais ces formes artistiques ne sont pas grand public simplement parce qu’elles ne sont pas assez diffusées. C’est plus leurs interprétations que leurs contenus qui les rendent inaccessibles. Je défends l’idée, même si cela peut paraitre démagogique, que le public est exigeant et a du discernement. C’est un problème d’offre plus que de réception d’offre.









La Singette : Et puis quoi encore, t’es plouc ou quoi de t’enfermer dans cette région paumée du Médoc d’un certain point de vue « De loin on dirait une île », comme le titre du dernier opus d’Eric Holder ? Je ne sais pas moi, mais Pantin, ça à plus de gueule que Bordeaux au bord de l’eau ! Non mais sans dec, il existe un Centre national de la danse du côté de Paname où des messieurs et des mesdames prout prout de mammouth viennent délirer sous la moumoute en zieutant quelques ziguettes ou zigues qui se dézinguent le corps sur scène. C’est bath de chez bath !
L’an passé, lorsque j’ai assisté à la 7 ème édition des « Grandes traversées » à la Base sous-marine de Bordeaux, je n’ai pas ressenti ce snobisme à la mode pour bobos déphasés. Déjà il y avait moult jeunesse en goguette. A quoi tu attribues le fait que le public à la fête varie des varices entre deux hémisphères éloignés d’à peine moins de 700 bornes ?









Eric Bernard : Plus les Artistes ont du talent plus ils sont de l’humilité et plus ils sont en capacités à communiquer avec des publics larges. Dostoïevski a dit que « le beau sauvera le monde… », mais ça c’est l’affaire de toutes et tous. Les arts contemporains montrent plus qu’ils ne démontrent et dans cette logique, à partir du moment où les cœurs parlent aux cœurs tout peut se mettre en marche.









La Singette : Puisque désormais tu crèche dans le Médoc et que le blase de cette région m’inspire des cépages, le crû fin 2008 / année 2009 des « Grandes traversées » sera-t-il un bon crû et en quoi justement dans ta quête toujours renouvelée dans l’innovation exprimeras-tu des variations avec les précédents ?









Eric Bernard : C’est une édition gonflée du fait des programmations ultra jeunes et jamais accueillies en France, ultra gonflées sur la période et c’est ultra gonflé de présenter autant en si peu de temps. Mais c’est toujours pour nous le meilleur moyen de rester en vie que de renouveler sans cesse nos pratiques. Il fait faire attention a ne pas vieillir plus vite que le public et les artistes. De toute façon, je ne peux pas travailler autrement, je m’ennuie très vite… Cette édition est donc une excellente occasion de se connecter avec tout ce qui se fait aujourd’hui aux quatre coins de la planète et dans toutes les formes artistiques









La Singette : Tu peux nous présenter ton équipe et nous dire comment tu bosses d’une année sur l’autre un projet à concrétiser ?









Eric Bernard : Le concept de notre équipe a une forme plus horizontale que pyramidale...Cela veut dire que chacun doit faire ce pourquoi il est responsabilisé sans rapport de subordination ou d’autoritarisme. Chacun avec les autres et ensemble pour faire avancer le projet. D’ailleurs le public est lui-même dans l’équipe à sa place de public tout comme l’artiste qui lui est présent partout… C’est peut être un peu flou mais c’est cette dimension d’équipe très large qui doit créer le concept de communauté agissante. Juste une pensée particulière pour Virginie avec qui je partage tout et même beaucoup plus !









La Singette : Est-ce que tu penses que la danse contemporaine a sa place à l’école élémentaire et dans l’enseignement secondaire et qui plus en est dans le Médoc, région paumée et enclavée par l’excellence de la richesse de sa géographie et sa population qui aspire peut-être à une autre réalité que ce nouvel apport culturel ?









Eric Bernard : La danse à l’école ou les arts à l’école est une question qui ne doit pas se poser. C’est normal, indispensable et légitime dans tous les milieux et toutes les géographies sans exceptions. De manière plus complexe, mais plus intéressante je le crois, la discipline artistique n’a pourtant pas de sens si elle n’est mis en regard avec les autres. Les questions et les apprentissages qui se posent à l’école et surtout à l’école primaire sont des stades cruciaux, où tout se croise et se noue. Pour moi donc l’économie ne peut se comprendre sans son interaction avec la géographie, les maths avec la poésie et l’histoire, le français avec les autres langues, la physique, la danse et l’anatomie, la musique et l’histoire etc.…C’est l’opposition entre le sectoriel et le transversal. C’est un peu commun mais pour moi tout est transversal et rien ne s’explique ni ne se comprend isolément. L’apport culturel cela ne veut rien dire. C’est un droit pour tous et sans légitimité économique. De toute façon tout ce qui est vraiment important ne s’achète pas.





La Singette : Comment réagissent tous les artistes du monde entier que tu invites à




fouler le sol aquitain, voir même goûter le Médoc par la boutanche de l’estuaire de la Gironde et l’océan Atlantique si toniques pour les esprits et les corps ?





Eric Bernard : Ailleurs meilleurs est aussi une idée préconçue… Les Artistes que nous accueillions sont toujours en mouvement aux quatre coins de la planète, à vivre entre trois hôtels quatre avions et deux fuseaux horaires… Ce qui a émerveillé Jared Gradinger notre prochain invité, c’est la singularité d’un pays qui semble perdu et oublié de tous sans rien, alors qu’il a peut être le plus important : sa poésie et sa sincérité (géographie et poésie, voir ma réponse précédente).
Ce bout des terres, ou le début en fonction du sens dans lequel on le regarde a une force créative inouïe. Je pense que les grandes aventures, sociales, humaines, esthétiques ; mais tout cela c’est la même chose ; de notre époque sont à vivre et se créeront là où on ne les attend pas, justement parce qu’elles vont s’inventer d’elles mêmes sans les contraintes ou les prismes formatés des lieux où elles sont attendues. C’est l’histoire de la nature et du vide et encore une du monde et du beau…








La Singette : Est-ce que tu pourrais envisager vivre et partager une manifestation culturelle dans le Médoc avec des artistes de la plume, d’en avant la zizique comme aurait dit l’ami Boris Vian ou autres domaines et selon quelles modalités ?





Eric Bernard : je ne l’envisage pas, nous allons le faire l’été prochain…Entre deux rives ! St Vivien, Talais, Grayan, Soulac et Royan pour la deuxième partie de projet de Jared Gradinger « How do you are part 2 », à suivre ….









La Singette : Si tu as quelques chose à ajouter, surtout n’hésite pas ce sera avec plaisir.





Eric Bernard : www.lesgrandestraversees.com, merci et à bientôt !









Pour sûr j’irai et même qu’avant les dates des 30 et 31 décembre, je proposerai aux lectrices et lecteurs du Mague quelques mots à propos de la programmation riche en couleur.
Et puis pendant que j’y serai, vous aurez droit également à ma plongée sans aucune apesanteur pour un autre article relatant ma visite en ce lieu magique qu’est la Base sous-marine de Bordeaux où se déroulera le nouvel épisode des « Grandes traversées : Tanz Marathon Nacht Theater du 30 décembre et le Count partydown happy new year ! du 31 décembre.












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