Pas plus tard que samedi dernier, j’ai accompagné le Bartos à un mythe/ing libertaire appelant à l’abstention, seule solution plausible pour ne pas serrer les pognes de la camarde Sarko ou Ségogo, les gogos !
Quelques gugusses femelles et mâles toutes les générations confondues avaient répondu à cet appel pour venir écouter les orateur(e)s et débattre. Il y avait des personnages… le Bartos n’a pas arrêté de jouer du stylo sur le papier et vous les croquer dans l’un de ses prochains bouquins. Gaffe, c’est un vampire ce type là !
Il y aurait entre 6 et 7 millions d’abstentionniste et 4 millions de non inscrits. Ca fait du monde les potos… même si leur action à toutes et à tous ne revête pas toujours le point de la vue au grand air du partage, selon un courant fraternel d’égalité et de solidarité. Il n’empêche, je ne peux m’empêcher de rêver d’un monde libertaire…
J’ai beaucoup apprécié l’intervention du compagnon qui ventait force six la décroissance en réponse à la croissance d’un monde fini, et tirait ses piques au développement durable d'un lointain cousin raté du grand Jacques Tati et au commerce équitable. Commerce équitable, déjà le terme de commerce me donne la gerbe, alors l’étiqueter dans ce système de rapport au pouvoir et au fric, franchement, il y a comme une incommunicabilité d’humeur entre ces deux termes du marchandage de nos libertés.
Bon, certes, les nanas et les mecs, c’était pas toujours des joyeuses et des joyeux, Maurice, le Bartos m’avait prévenue. Ca veau pas la bande à ce cher Ramon Pipin, mais bon pinpon, c’était quand même bath et surtout ça me réchauffait les tripes de savoir qu’il y avait encore des gens qui zappaient la téloche et mouchaient le trop de réalité imposée et se battaient. De l’urne à la tune, il n’y a qu’un papier culcul et pas de salut. Y’avait aussi des papis et des mamies dans la verve naturienne, le pied ! (à lire bientôt, mon papier consacré à l’excellent livre de Céline Beaudet que le Bartos et son aminche Yves invitent à conférencer cet été au Ventous….).
Je ne peux que vous solstice d'été à lire le style et le contenu de cette lettre d’Elysée Reclus à Jean Grave, que je reproduis de mes petites mains émues, qui concerne le thème de l’abstention. Quelle plume, quel homme….. !
Clarens, Vaud, 26 septembre 1885
Compagnons,
Vous demandez à un homme de bonne volonté, qui n’est ni votant ni candidat, de vous exposer quelles sont ses idées sur l’exercice du doit de suffrage.
Le délai que vous m’accordez est bien court, mais ayant au sujet du vote électoral, des convictions, bien nettes, ce que j’ai à vous dire peut se formuler en quelques mots.
Voter, c’est abdiquer ; nommer un ou plusieurs maîtres pour une période courte ou longue, c’est renoncer à sa propre souveraineté. Qu’il devienne monarque absolu, prince constitutionnel ou simplement mandataire muni d’une petite part de royauté, le candidat que vous portez au trône ou au fauteuil sera votre supérieur. Vous nommez des hommes qui sont au-dessus des lois puisqu’ils se chargent de les rédiger et que leur mission est de vous faire obéir.
Votez, c’est être dupe ; c’est croire que les hommes comme vous acquerront soudain au tintement d’une sonnette, la vertu de tout savoir et de tout comprendre. Vos mandataires ayant à légiférer sur toutes choses, des allumettes, aux vaisseaux de guerre (…) il vous semble que leur intelligence grandisse en raison même de l’immensité de la tâche. L’histoire vous enseigne que le contraire a lieu. Le pouvoir a toujours affolé, le parlotage a toujours abêti. Dans les assemblées souveraines, la médiocrité prévaut fatalement.
Voter, c’est évoquer la trahison. Sans doute, les votants croient à l’honnêteté et ceux auxquels ils accordent leurs suffrages – et peut être ont-ils raisons le premier jour, quand les candidats sont encore dans la ferveur du premier amour. Mais chaque jour a son lendemain. Dès que le milieu change, l’homme change avec lui. Aujourd’hui, le candidat s’incline devant vous, et peut-être trop bas ; demain, il se redressera et peut-être trop haut. Il mendiait les vote, il vous donnera les ordres. L’ouvrier, devenu contremaître, peut-il rester ce qu’il était avant d’avoir obtenu la faveur du patron ? Le fougueux démocrate n’apprend-il pas à courber l’échine quand le banquier daigne l’inviter à son bureau, quand les valets des rois lui font l‘honneur de l’entretenir dans les antichambres ? L’atmosphère de ces corps législatifs est malsain à respirer, vous envoyer vos mandataires dans un milieu de corruption ; ne vous étonnez-pas s’ils en sortent corrompus.
N’abdiquez donc pas, ne remettez donc pas vos destinées à des hommes forcément incapables et à des traîtres futurs. Ne restez-pas ! Au lieu de confier vos intérêts à d’autres, défendez-les vous-mêmes ; au lieu de prendre des avocats pour proposer un mode d’action futur, agissez ! Les occasions ne manquent pas aux hommes de bon vouloir. Rejetez sur les autres la responsabilité de sa conduite, c’est manquer de vaillance.
Je vous salue de tout cœur, compagnon.
Elysée Reclus
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